8.10.17

NE SOYEZ INQUIETS DE RIEN



DIMANCHE 8 OCTOBRE 2017 - 27ème Dimanche T.O. A

Une fois encore,  nous voici placés par l’Évangile, au cœur des vignes.
C’est la saison !

Il y a deux semaines, je célébrais un joyeux mariage en Bourgogne, entre Meursault et Pommard.
Le vin y fut, sans doute, presque aussi bon que celui de Cana !

J’ai expliqué aux futurs mariés que, dans la Bible, la vigne est souvent un symbole fort.

Il y a les sarments sur qui il faut veiller, qu’il faut entourer de mille attentions afin qu’ils donnent le meilleur.
Il y a les raisins qui réjouissent les yeux et le palais et qui, amoureusement travaillés, donnent du bon vin. Parfois de très grands crus !

La vigne, dans la Bible, désigne le plus souvent le Royaume de Dieu qui nous est confié…

Dans les lectures que nous venons d’entendre, cette vigne perd soudain de sa clarté.
Ses collines sont dévastées, comme après une méchante grêle, ou comme engluées dans une stratégie haineuse de captation d’héritage !

Dans le texte d’Isaïe, elle ne donne pas de fruit et suscite la désolation du propriétaire.

De façon allégorique, le prophète Isaïe désigne du doigt les mauvais vignerons qui ne sont autres, à ses yeux, que les chefs des prêtres et les pharisiens qui n’ont pas su veiller sur la vigne d’Israël, qui ont trahi la pureté du message, celui de la Genèse, de l’Exode, des prophètes et se sont installés, bien à l’abri, dans le confort de leur sinécure cléricale !

Dans l’Évangile, la vigne représente le Royaume confié par le Père à un peuple qui, lui aussi, dévoie la Bonne nouvelle, refuse la conversion du cœur, et va jusqu’à tuer le propre Fils du propriétaire…

D’un côté comme de l’autre, la vigne de la vie est donnée, offerte, proposée et l’homme rejette, piétine, bafoue ce don.
Par peur, appât du gain, volonté de puissance, désir d’être à soi-même son propre vigneron !

Peut-être que ces histoires de vignes transformées en champ de bataille ressemblent parfois un peu à nos propres vies ?

Comme les piètres vignerons de l’Évangile, nous voudrions être les seuls propriétaires de nos existences, régner en Maître sur la vigne de nos vies…
Des vies auxquelles nous voudrions épargner la grêle, la taille à la fois douloureuse et amoureuse de ce qui nous encombre, la sécheresse, la maladie, le « mildiou » du corps et  l’âme, le « pressoir » de la Croix…

Nous nous rêvons en vignerons tout puissants et auto suffisants.
« Besoin de personne ! » dit la chanson…
Et surtout pas d’un « sauveur » qui viendrait entretenir, tailler, redresser, nos propres sarments rétifs…

Or, ce que nous propose le Christ, c’est justement un dessaisissement, un « lâcher prise ».

Il nous offre de lui confier la vigne de notre propre existence, de le laisser prendre soin des fruits de nos vies, vigneron aimant et attentif face à toutes les fragilités qui nous guettent.

Pour laisser le maître de notre vigne préparer avec soin la vendange, saint Paul, dans son épître aux Philippiens, nous donne un précieux conseil :

« Ne soyez inquiets de rien,
mais, en toute circonstance,
priez et suppliez,
tout en rendant grâce,
pour faire connaître à Dieu votre demande.
Et la paix de Dieu qui dépasse tout ce qu’on peut concevoir,
gardera vos cœurs et vos pensées dans le Christ Jésus. »

Je vous invite à méditer ces mots de feu de saint Paul. Tout y est dit !

Et d’abord cette profonde vérité : tout passe d’abord par la prière. Ce lent et fécond dessaisissement, cette remise de la vigne de nos vies entre les mains du Divin Vigneron ne sont possibles que si nous confions nos existences au pressoir de la prière.

Une prière qui, patiemment, nous extirpera de cette mauvaise inquiétude qui si souvent nous ronge.

Une prière qui ne craindra pas de « faire connaître à Dieu notre demande ». Voir de « supplier le ciel ».

Une prière qui n’oubliera pas, malgré toutes les blessures qui nous assaillent, de « rendre grâce » pour la vie qui, malgré tout, est là.

Une prière qui, pas à pas, nous permettra d’accéder à cette « paix de Dieu qui dépasse tout ce qu’on peut concevoir ».

En nous parlant ainsi de la prière, saint Paul n’ignore rien du « dur métier de vivre ».
Il ne confond pas la prière avec un édredon, un  épais coton de chloroforme ou une sorte d’anesthésie générale qui nous dispenserait d’avoir à affronter les coups de butoir inévitables de la vie.

Pour lui, prier, ce n’est pas fuir le monde, c’est au contraire se donner les moyens de mieux le rejoindre.

Et ne faisons pas l’erreur des mauvais vignerons qui veulent tout contrôler et tout diriger : dans la prière, le principal « acteur » ce n’est pas nous !

Prier, ce n’est pas « faire » des prières, c’est « se laisser faire » !

Nous avons juste à confier au Christ Vigneron le cœur de notre vigne intérieure.

Et lui saura en nous, souvent sans nous, parfois avec nous, rejoindre, à travers nous, son Père.

Alors, peut-être que nous sera donner de gouter quelques instants au vin de cette « paix qui dépasse tout ce qu’on peut concevoir » évoquée par saint Paul.

Nous pourrons alors faire nôtres ces paroles du psaume, magnifiquement reprises dans un célèbre chant de Taizé :
« Mon âme se repose, en paix sur Dieu seul. De lui, vient mon salut ».



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