16.9.19

ANNIVERSAIRE D'ORDINATION DIACONALE


 Ordonné diacre il y a tout juste 20 ans !




ANNIVERSAIRE Samedi 14 septembre, nous avons
 mémoire de mes 20 ans d'ordination diaconale au cours d'une messe joyeuse présidée par mon ami et ancien curé, Bruno Valentin devenu évêque auxiliaire de Versailles en janvier dernier... En présence de prêtres du secteur et d'une vingtaine de diacres toujours aussi fraternels ! Une belle célébration, une superbe homélie (merci Bruno pour ce que tu as dit du ministère diaconal) et beaucoup d'émotion...
VOICI LE MOT FINAL que j'ai adressé à l'assistance nombreuse et amicale : 

"Chers amis, 
Un grand merci d’être venus nous entourer en ce jour où nous faisons mémoire de mon ordination diaconale. C’était il y a tout juste vingt ans au CAP st Jacques. J’acceptais, avec le soutien de Sabine, entouré de nos 5 enfants ici présents, de répondre à l’appel de Jean-Charles Thomas, alors évêque de Versailles.
Quelques années auparavant, j’avais été interpellé par un ami prêtre, alors en charge de la communication de l’Église de France. Journaliste, avec un pied dans la presse catholique et l’autre à la télévision, j’étais souvent témoin d’une incompréhension entre l’Église et les médias. Certains de mes collègues de France 2, sachant que j’étais chrétien, m’interpellaient face à ce qu’ils percevaient comme des archaïsmes. 
Dans les couloirs de France Télévision j’avais régulièrement droit à la question piège : « T’as entendu ce que « ton » pape a encore sorti ! » Je ramais alors pour tenter d’expliquer les subtilités d’un texte dont je devais pourtant bien avouer qu’il n’était pas toujours un modèle de communication grand public !
Plus profondément, je percevais souvent, derrière les amicales provocations de mes confrères journalistes, et aussi d’un certain nombre d’artistes et d’écrivains que je côtoyais sur la planète médias, une vraie quête de sens, une authentique soif spirituelle dont je me désolais qu’elles ne trouvent pas à s’étancher à la source d’une Église davantage perçue comme hautaine et moralisatrice que maître de vie…
Un soir, mon ami prêtre m’a balancé sans crier gare, une question à laquelle je ne m’attendais pas. Il m'a dit a peu près ceci : « Au lieu de râler, tu ne pourrais pas t’y coller un peu ? Accepterais-tu de réfléchir à la perspective de devenir diacre, envoyé par l’Église au cœur des médias ? » 
Je suis, je vous l’avoue mes amis, ce soir-là tombé de l’armoire !
J’ai bien tenté un peu de me défiler. Mais j’ai finalement accepté d’entendre l’appel de mon Église et d’y répondre avec mes pauvretés et mes limites.
Vingt ans après, je râle toujours – un peu ! – contre les rhumatismes d’une Église qui a encore souvent mal aux articulations avec la modernité. Je la rêve plus miséricordieuse devant les blessures de l’amour, moins cléricale, moins masculine dans sa gouvernance et davantage ouverte aux femmes, moins craintive dans son dialogue avec la culture contemporaine tout en me réjouissant des avancées portées par ce pape courageux et prophétique qui porte si bien le nom du saint pauvre d’Assise !
Au cours de ces années, j’ai tenté d’habiter ce beau ministère qui est, par excellence, un « ministère du seuil », un point de jonction, de charnière entre l’Église et le monde. 
Avec facétie, mon ami le père Bruno Chenu me rappelait souvent sa définition du diaconat : « Le diacre est une espèce de... gond ! »
Le diacre se tient à la porte et veille à ce qu’elle s’ouvre – sans trop grincer ! –, dans les deux sens : sur le monde et sur l’Église…
Oui, être diacre, c’est être bilingue, c’est accepter de parler la langue des hommes et des femmes de ce temps et la langue de l’Église et de l’Évangile, c’est assumer l’inévitable risque qu’il y a à être un « passeur » entre des univers, des cultures, des mentalités, des vies qui, habituellement, ne se parlent pas beaucoup. 
J’adhère à cette interpellation d’Albert Rouet, ancien archevêque de Poitiers. « L’urgent n’est pas tant de savoir qui vient encore dans nos églises, mais VERS QUI va l’Église ? » 
Je crois qu’effectivement le diaconat se joue là : l’Église n’attend pas que des hommes et des femmes qui ne mettent presque jamais les pieds dans nos paroisses en franchissent soudain le seuil. Elle leur envoie des baptisés, parmi lesquels quelques ministres ordonnés, afin qu’ils s’en fassent des amis. A l’heure des replis identitaires où sévit la tentation de l’entre soi, cette amitié avec le monde est plus que jamais nécessaire. 
On n’annonce pas l’Évangile à une société vis à vis de laquelle on est continuellement en position de défiance… 
Juste avant la consécration, le diacre verse quelques gouttes d’eau dans le vin du calice et prononce cette phrase lumineuse : « Comme cette eau se mêle au vin pour le sacrement de l’Alliance puissions-nous être unis à la divinité de Celui qui a pris notre humanité ». 
C’est en effet le rôle du diacre que de venir s’approcher de l’autel pour déverser dans le vin de la Résurrection l’eau à la fois claire et boueuse, pure et impure de l’humanité, cette eau que le Christ recueille entre ses mains et mêle à l’argile pour pétrir l’onguent qui rendra la vue à tous les aveugles nés que nous sommes ! 
Depuis 20 ans que je suis diacre par la folie d’un appel imprévu, il y eut bien quelques échecs, mais il y eut surtout de grandes joies et d’inoubliables rencontres avec mes amis des médias et du monde littéraire et artistique mais aussi, et peut-être surtout, avec nombre de femmes et d’hommes plus discrets, plus « anonymes » dirait-on mais non pas sans visage ! 
Ces « gens des rues », croyants ou incroyants, évoqués par Madeleine Delbrêl, que j’ai essayé d’écouter, avec qui j’ai partagé un bout de chemin pour évoquer le sens de la vie, accompagner une souffrance, une maladie, un deuil, préparer un baptême, un mariage ou tout simplement ouvrir, avec pudeur et respect, la seule grande question qui vaille : celle de l’existence de Dieu… 
Pour vous et avec vous, amis de la paroisse et d’ailleurs, avec la complicité de Sabine et des enfants, en communion avec mon évêque Éric Aumônier qui m’écrivait hier ces mots que je vous partage : « Je m’associe cher Bertrand de tout cœur à cet anniversaire en faisant mémoire de ce que le Seigneur accomplit à travers votre ministère. Le témoignage de fidélité et d’ouverture que vous rendez avec Sabine est un cadeau qui nous est fait… » 
Également en amicale proximité avec toi, cher Bruno Valentin, à qui je souhaite bon vent dans cette charge épiscopale nouvelle. Et avec vous, mes frères prêtres et diacres, je vais continuer l’aventure. 
Tenter d’être ce serviteur de la Joie par qui Dieu à quelque chose à vous dire…

« Seigneur, ouvre mes lèvres, et ma bouche publiera ta louange ! »

Un immense merci à toutes et à tous ! "




EN FIN DE MESSE les amis et la communauté paroissiale nous ont offert à mon épouse et à moi-même, un temps d'escale au monastère de Bose, magnifique communauté italienne mixte et oecuménique où nous aurons la joie de retrouver notre fidèle ami, le frère Enzo Bianchi !