1.12.18

L’AVENT, CE MÉTIER À TISSER LA LUMIÈRE…


Méditation pour le 1er Dimanche de l’Avent – Année C – 2 décembre 2018


« Sur terre, les nations seront affolées et désemparées par le fracas de la mer et des flots… »

«  Les  puissances des cieux seront ébranlées… »

« Les hommes mourront de peur… »

A entendre le récit apocalyptique que nous fait saint Luc, nous pourrions nous demander si l’évangéliste n’a pas été puiser son inspiration  au Journal de 20 heures, ou en lisant les prédictions glaçantes de la COP 21 ou 24 !

Comment, en effet, ne pas être frappés par les similitudes avec l’actualité qui, chaque jour, se fait l’écho des fracas de la planète :

les mers et les ouragans qui se déchaînent,
le feu qui consume des villes entières,
la pollution et le réchauffement climatique qui, chloroformés par le déni des puissants, tuent massivement,
tant de réfugiés, hommes, femmes et enfants, jetés sur les routes de l’exode qui viennent agoniser aux pieds des murs d’indifférence que les pays repus dressent, pierre après pierre, devant leur espérance de survie…

C’est comme si la vieille bagnole de l’humanité fonçait à tombeaux ouverts vers le ravin de la fin du monde, sans que le pilote daigne regarder la route ou appuyer sur le frein.
Sans que les passagers du chauffard sourd et aveugle ne se rendent compte qu’à chaque embardée la carriole folle écrase celles et ceux qui tentent de lui faire signe sur le bord de la route…

Comme si, inexorablement, l’histoire se répétait.
Comme si, une fois encore, la porte de l’auberge claquait, comme il y a 2.000 ans, à la figure du pauvre et du fragile.
Comme si les locataires de cette auberge barricadée se croyaient à l’abri, bien au chaud et peinards, alors que la « maison commune » de notre terre se lézarde de toute part… 

Peut-être, chers amis, pensez-vous que je m’égare, que ce n’est pas le sujet, que nous sommes loin de l’Avent dans lequel nous entrons aujourd’hui ?

Mais que serait notre marche vers Noël si elle ne se faisait pas au plus près de l’humanité fragile, au plus proche du quotidien, souvent difficile, de tant d’hommes et de femmes ?
Quel sens y aurait-il à chanter la Nativité si nous ne nous faisons pas accoucheur d’espérance auprès de celles et ceux dont l’espoir s’essouffle  dans le raide escalier de leurs vies bouleversées ?

Notre paroisse nous invite à inventer cette année de nouveaux sentiers de mission.

Vivre la mission, ce n’est pas d’abord partir, étendard à la main, tenter de convertir et de ramener les gens dans nos églises. C’est d’abord se faire écoute de ce qui  fait leur vie, leurs joies, leurs soifs, leurs doutes.

Être « missionnaire » c’est, d’abord et avant tout, « écouter la  différence » ! Aller vers l’autre, non pas pour que l’autre cesse d’être un autre et nous ressemble, mais pour s’enrichir mutuellement de nos différences.

Et chercher ensemble la route vers un peu plus de clarté.

Les peintres, lorsqu’ils tentent de représenter le mystère de la naissance du Christ, font se côtoyer, dans un ardent combat, la lumière et la nuit.
Les plus talentueux nous font sentir combien la lutte est rude entre la fragile clarté de l’espérance naissante, et l’obscurité drue qui voudrait avaler la flammèche de vie.

Vivre l’Avent, c’est participer de toutes nos forces à ce combat entre le crépuscule et l’aube, la pesanteur et la grâce.

Un combat certes spirituel où la prière régulière nous donnera l’énergie nécessaire. Mais un combat aussi très concret, au plus près des luttes pour la dignité humaine et la sauvegarde de notre planète, alliant, dans une même pugnacité urgence de justice sociale et urgence écologique.

Prions pour que, dans notre marche vers Noël, nous laissions le Christ qui vient, faire de nous des messagers de cette « parole de bonheur » qu’évoque le prophète Jérémie.
Que lorsqu’il viendra y naître, l’enfant de la divine promesse trouve un peu de place dans l’auberge de notre cœur !

Oui, « redressons-nous et relevons la tête » pour – en nous et autour de nous – faire advenir cette « homme debout » qu’évoque l’évangile.


Mettons les nuits obscures des hommes sur ce grand métier à tisser la lumière qu’est l’Avent…


(C) B.RÉVILLION